Panel 3 : la problématique de l’accès au logement, à la santé et l’éducation en milieu urbain : la persistance des poches de vulnérabilité

Modérateur : AMANDA Flettty

« En demandant le suffrage des populations, c’était pour la satisfaction de leur besoin. Et dès l’entame de notre mandat, nous avons initié une rencontre participative avec toutes les populations pour faire le diagnostic réel de leur localité. Au terme de cette rencontre le point de la situation réelle des infrastructures et les besoins prioritaires ont été faits village par village. A l’issu de cette rencontre trois priorités ont été déterminés : l’adduction en eau potable, la santé et les équipements. » a affirmé le 1er paneliste Monsieur Siama Bamba, Président du conseil régional de la Bagoué en Côte d’Ivoire.

La démarche requise par le conseil régional pour résoudre ces problèmes est la suivante : faire un atelier avec les mutuelles de développement, les fiches de diagnostics comprenant l’existent des infrastructures et les besoins, les résultats ont été présentés aux chefs de village pour la confirmation, les résultats ont été consolidés et une matrice d’action triennale départementale.

Il a signifié que la région de Bagoué est restée en crise pendant plus de 10 ans, crise causée par la rébellion de 2002 avec pour conséquence un manque cria d’infrastructure. Pour y remédier, il est prévu un investissement sur la période de 2022 à 2024 dans les secteurs essentiels tels l’éducation, la santé et l’eau. Au niveau de l’éducation, 15 projets ont été prévus pour un budget de 15 647 605 000 F CFA soit 36% du budget triennal. Au niveau de la santé, il est prévu 1 032 298 000 F CFA soit 22,54 % du budget triennal. Pour le secteur des infrastructures économiques dont l’hydraulique, c’est 492 092 000 F CFA, soit 10,75 % du budget triennal. Ces secteurs, à eux seuls absorbent 70% du budget triennal.

En dépit des résultats remarquables obtenus en matière d’éducation, de santé et de l’eau, des poches de vulnérabilités existent. Si pour l’éducation et la santé des investissements ont été réalisés, de nombreux efforts restent à faire pour combler le déficit en eau estimé à 194 forages à motricité humaine, 21 pompes hydrauliques villageoises améliorées et 20 HU. Cela nécessite un investissement de plus de 11 milliards F CFA. Toutes ces poches de réduction de vulnérabilités n’auront véritablement un sens si la question de l’autonomisation des jeunes et des femmes en milieu urbain et rural est réglé. Les autres actions à entamer se
résument au désenclavement des villages par l’ouverture et le reprofilage des voies, l’amélioration de l’accès à l’électricité de localités reculées, la résolution des problèmes d’accès à l’Etat civil.

En conclusion M. Bamba, relativement au caractère indispensable des secteurs de la santé, de l’éducation et de l’eau au développement de toute population, des efforts supplémentaires sont donc nécessaires. Le développement la Bagoué ne sera donc total que si toutes les dimensions citées plus haut sont prises en compte.

Pour le 2e panéliste, Dr AKE Paul Blanchard, avance que, les concepts de logement, de santé et d’éducation s’entremêlent et sont donc des problématiques liés.

Au niveau des logements, le conférencier soutient que certains s’attardent sur la dimension économique du logement, pourtant il faut plutôt penser à d’autres paradigmes. Pour le ce paneliste, l’Etat a consenti beaucoup d’effort dans les logements sociaux et la couverture maladie universelle. En dépit de toutes ces actions, des poches de vulnérabilités existent encore. Les populations ont une conception idéologique, une pensée ségrégationniste. Pour elles, habiter dans une commune comme Cocody requiert d’une certaine classe sociale. L’autre aspect de l’accès au logement est celui des résidences meublées et la loi ivoirienne semble rester muette sur leur existence alors que ces résidences font la concurrence aux grands hôtels.

Quant au troisième panéliste, M Baba NDIAYE, avance que la question du logement est différemment appréciée aussi bien en Côte d’Ivoire qu’au Mali. Mais au Sénégal, elle est accentuée par l’exode rural surtout en saison sèche. Pendant cette période, les populations ont tendance à migrer vers les villes construire par la suite des habitats de fortunes dans les zones à risques et s’exposer ainsi aux risques d’inondations. Pour lui il existe trois solutions pour remédier à ces problèmes : la restauration urbaine (très coûteuse), la rénovation urbaine (moins coûteux et moins compliqué), l’aménagement urbain (la prévention, construction des équipements).

Par ailleurs, il préconise une démocratisation de la gestion de ces équipements. C’est-à-dire prendre des initiatives importantes pour lutter contre les moustiques. Développer des résolutions importantes de comité des gestions dans chaque localité pour faciliter la prise en charge des plus vulnérables.

Au niveau de l’éducation, il fait remarqué un déficit d’établissement, un problème d’accès aux établissements, des établissements non clôturés, des écoles provisoires. Pour résoudre ces problèmes, en partenariat avec la chambre des métiers de Kaolack, il a été initié un programme dénommé “école pour chacun”. Ce programme a permis de sécuriser plusieurs établissements scolaires. Plusieurs jeunes ont été formés dans le cadre de ce projet en vue de participer à l’amélioration de l’accès à l’établissement scolaire en réalisant des murs, des
clôtures sécurisées pour les écoles. D’autres initiatives en faveur de la démocratisation de l’école ont été entreprises notamment les livres numériques afin de faciliter l’accès à la documentation de tous les élèves. Cela a permis de régler la question d’équité, d’égalité et d’inclusion au niveau des franges de la population dont les moyens sont limités.
La question de l’état civil a été également aux coeurs des actions. Car souvent les élevés sont confrontés à des soucis d’Etat civil. Aujourd’hui, tous les registres d’Etat civil ont été sécurisés et numérisés pour faciliter l’accès aux documents des élèves.

En conclusion Monsieur BABA, révèle qu’en dépit des efforts consentis par les autorités pour régler le problème d’accès au logement en milieu urbain, beaucoup reste à faire. Comment améliorer l’impact des efforts consentis par les gouvernements à travers la participation des citoyens, de la société civil ? Telle est la question principale.

Pour Dr ASSUE Aimé, dernier panéliste de ce thème, parler de pauvreté en Côte d’Ivoire, fait penser aux indicateurs sociaux économiques ou financiers. Si vous dépensez moins de 350 F/jour, vous êtes considérés comme un individu extrêmement pauvre. A ces indicateurs, s’ajoute l’accès à l’éducation, aux soins de santé, à un logement décent et aux loisirs.

S’agissant de l’éducation, il affirme que le gouvernement ivoirien consacre près de 40% de son budget à ce secteur, consacré au paiement des salaires et au fonctionnement du ministère et ses démembrements. Mais ce qui entrave le bon fonctionnement de l’école, ce sont les frais annexes appelés frais COGES que le gouvernement a décidé de supprimer au cours cette année scolaire 2021-2022. Le système de bac probatoire constituait en quelque sorte des freins pour beaucoup d’éleves. Pour répondre à cette entrave, l’Etat a essayé de mettre en place des systèmes pour faciliter l’accès à l’éducation pour tous, à une éducation de qualité : la massification qui pose des problèmes dans l’affectation, l’accès à l’éducation pour tous, la mise en place des cours en ligne dans les universités en raison du COVID.

Pour ce qui est de la santé, depuis la conférence de Bamako en 1997, le système sanitaire a été privatisé. Mais à la suite de la crise post-électorale, il y a eu ce qu’on appelé la gratuité de la santé. Mais le coût de ce projet étant devenu exorbitant pour l’Etat, il est passé de la gratuité ciblé pour maintenir ce projet. Mais là encore, il y avait des difficultés car certains médicaments sont en manque.

La question du logement, le système urbanistique ivoirien est ségrégationniste et exclusionniste. Le système a tendance à exclure les plus faibles. C’est pour remédier à cette discrimination que l’Etat ivoirien a décidé de construire 60 milles logements sociaux. Mais ce projet peine à décoller à cause des coûts qui se trouvent exorbitants pour les populations les plus pauvres.

Après l’intervention des panelistes, le modérateur a ouvert la séance des échanges. Elle a vu l’intervention de quatre (4) personnes. A cette étape plusieurs contributions et partages d’expériences ont été faites par les intervenants.

Une contribution de Mme DJIBRIL Cécile, Directrice des services sociaux sanitaires de l’hygiène publique de la mairie de Port-Bouet. Elle a pris la parole pour partager l’expérience de sa commune en matière de gestion de la santé. Elle affirme que trois (3) mécanismes ont été mise en place pour faciliter l’accès des populations à la santé :

– 8 centres de santé municipaux dont 03 urbains et 05 dans les villages espaces ruraux ;
– Chaque année des subventions sont votées et allouées à ces centres de santé pour organiser les activités foraines (100 millions) ;
– Faire des consultations foraines ciblées (consultation de cataractes, des chirurgies) ;
– Une subvention dédiée aux affaires sociales (40millions).

À la suite de Mme Djibril, M KOUYA, Secrétaire général du mouvement de défenses des droits des enseignants de Côte d’Ivoire (syndicat du privé) a évoqué le problème de l’accès au logement en Côte d’Ivoire. Pour terminer son propos, l’intervenant a soulevé la question suivante : Est-ce qu’il était possible d’avoir en Côte d’Ivoire une cité dédié à l’enseignant ?

Pour M. KOUTI, Directeur immobilier à la Banque de l’habitat, la problématique de l’habitat n’est pas nouvelle en Côte d’Ivoire. Elle existait bien avant l’avènement de la crise du Covid mais elle s’est accentuée durant cette pandémie. C’est pourquoi le gouvernement a initié le programme des logements sociaux. Il a préconisé que les pouvoirs publics doivent donc agir pour faciliter l’acquisition des logements par les populations, en adoptant la location ventre initié déjà dans les années 80. Il a aussi signifié que l’État s’appuie sur la Banque de l’habitat pour des programmes immobiliers aidant les acquéreurs à l’obtention des logements sociaux.

Selon M. SANOGO Mamadou, 5ème adjoint au maire de la commune de Cocody, en Côte d’Ivoire, on constate que le logement précède l’aménagement or c’est le contraire qui devait se produire. Beaucoup de quartiers sont créés sans aménagement et cela crée des inondations en période pluvieuse. En 2012, au niveau de la commune de Cocody, 1 m² de terrain aménagé coûtait 17 000 F.CFA, ce qui constitue un frein à l’accès au terrain pour la construction. Il a noté la persistance de la ségrégation car les logements sociaux n’existent pas pour le moment en Côte d’Ivoire parce que l’accès au foncier constitue encore des soucis pour l’État.

Le dernier intervenant M. DJIBA Karamoko a signifié que le logement social sera possible qu’avec une fortement implication de l’État dans la chaîne de
production. Il faudra privilégier poursuit ce participant le mode production en hauteur.

En guise de conclusion, il est ressorti de ce panel que les pouvoirs publics doivent donc agir pour faciliter l’acquisition des logements par les populations, en adoptant la location ventre initié déjà dans les années 80. Aussi, il faut donc une forte implication de l’État dans la chaîne de production des logements.

Téléchargez le document ici: https://oidp-afrique.org/wp-content/uploads/2021/11/7-la-problematique-de-l’acces-au-logement.pdf

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