L'entrepreneuriat féminin est un facteur clé du développement africain

Les femmes qui veulent créer un business en Afrique sont encore trop confrontées aux inégalités du marché du travail. Par Dominique Nouvian Ouattara.

En dépit de la place centrale qu’elles occupent au sein de la famille et la société, les femmes africaines demeurent les principales victimes de la pauvreté. Comme le signale la Banque mondiale, contrairement à ce qui se passe dans les pays développés, où les suppressions de postes concernent davantage les hommes, la crise en Afrique réduit surtout les possibilités d’emploi des femmes, premières victimes des contractions d’effectifs.
Le rôle majeur que les femmes jouent dans l’économie n’est plus à démontrer. Lors des conférences des Nations unies au Caire en 1994 et à Pékin en 1995 déjà, tous les Etats membres s’accordaient à dire que les femmes participent aux mécanismes de développement. Les études du Fonds de développement des Nations unies pour la femme (UNIFEM) montrent que le développement de l’entrepreneuriat féminin a un impact positif significatif sur la réduction de la pauvreté des ménages.
Une évidence, pourtant, si la proportion des femmes africaines travaillant pour leur propre compte varie considérablement d’un pays à l’autre, elle demeure globalement faible. D’après les chiffres du Fonds de recherche sur le climat de l’investissement et l’environnement des affaires (CIEA), à la fin de la dernière décennie, seulement 15 % des personnes travaillant pour leur propre compte au Maroc étaient des femmes. Cette proportion était de 23 % en Egypte et en Algérie, 37 % en Côte d’Ivoire, 39 % à Madagascar et 51 % au Cameroun.

Inégalités scolaires

Si les femmes sont victimes des inégalités et des injustices, elles sont aussi les acteurs-clés du changement. Puisque la pauvreté les concerne tout particulièrement, elles doivent être au centre de toutes les stratégies visant à lutter contre ce fléau. Aucun progrès véritable en la matière ne pourra être obtenu sans leur participation active. Cela n’est pas seulement une question de principe, mais aussi une question de bon sens économique. Les femmes sont présentes dans tous les secteurs de l’économie, et même si leur apport effectif au PIB de leurs pays est souvent méconnu, elles jouent un rôle déterminant en matière de sécurité alimentaire et d’agriculture, de promotion des droits de l’enfant et de fourniture de soins de santé.
Or, surtout présentes dans l’économie informelle, les femmes manquent de financements, ce qui représente un frein au développement de leurs initiatives entrepreneuriales. Assurer leur indépendance économique et financière est dès lors une étape indispensable afin de libérer les forces créatrices de richesse en Afrique. Nous devons dans un premier temps trouver des solutions leur permettant de concilier activité économique et vie de famille. Nous devons ensuite favoriser la mise en réseau des initiatives, afin qu’elles puissent bénéficier des conseils des personnes possédant de l’expérience dans le monde de l’entreprise.
L’amélioration du système éducatif et l’accès des femmes à la formation tout au long de la vie sont également des défis que nous devrons relever. La scolarisation des filles est très à la traîne par rapport à celle des garçons en Afrique subsaharienne (68 filles pour 100 garçons), et elles sont davantage concernées par le décrochage scolaire. Plus de filles africaines doivent aller à l’école et elles doivent y rester assez longtemps pour acquérir des savoirs nécessaires à l’action professionnelle.

L’importance du microcrédit

Concernant les graves problèmes de financement rencontrés par les femmes qui souhaitent entreprendre, nous devrons créer des ponts entre les porteurs de projets et les investisseurs, et favoriser toutes les initiatives qui vont dans ce sens, comme le Global Entrepreneurship Monitor (GEM) lancé par la Société financière internationale (IFC). Les femmes doivent avoir accès aux moyens de production, c’est une condition incontournable du développement. A titre d’exemple, la Banque mondiale estime que si elles avaient accès aux intrants agricoles au même titre que les hommes, la productivité pourrait augmenter de 10 à 30 %.
Pour ma part, j’ai eu le bonheur de mettre en place le Fonds d’appui aux femmes de Côte d’Ivoire (FAFCI), qui compte déjà plus de 110 000 bénéficiaires. Il s’agit d’un fonds de microcrédit à taux réduit dont le but est d’aider les femmes souhaitant créer ou étendre une activité génératrice de revenus. Je reste persuadée que nous devons toutes et tous nous engager à hauteur de nos possibilités et qu’aucun effort, aucune aide n’est négligeable. C’est un des messages que je souhaiterais transmettre aujourd’hui aux femmes d’Afrique, dont je connais non seulement les difficultés mais aussi la force et l’énergie: votre avenir vous appartient. Nous sommes nombreuses, et nombreux, à souhaiter nous battre à vos côtés pour une société plus égalitaire et plus juste. Apporter des solutions aux problèmes des femmes c’est apporter des solutions aux problèmes de toute la société. Travailler pour l’amélioration des conditions économiques et financières des femmes en Afrique, c’est travailler pour le développement de tout notre continent et de l’humanité.
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Par Dominique Nouvian Ouattara, Première Dame de Côte d’Ivoire
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